Avis important:
Les versions anciennes du navigateur Netscape affichent cette page sans éléments graphiques. La page conserve cependant sa fonctionnalité. Si vous utilisez fréquemment cette page, nous vous recommandons l'installation d'un navigateur plus récent.
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_325/2023  
 
 
Arrêt du 24 mai 2024  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz, Hänni, 
Ryter et Kradolfer. 
Greffier : M. Jeannerat. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________ SA, 
2. B.________ SA, 
3. C.________ SA, 
4. D.________ SA, 
5. E.________ SA, 
6. F.________ SA, 
7. G.________ SA, 
8. H.________, 
toutes représentées par Me Pierre-Yves Baumann, avocat, 
recourantes, 
 
contre  
 
Grand Conseil du canton de Vaud, 
place du Château 6, 1014 Lausanne, 
 
Conseil d'État du canton de Vaud, 
Château cantonal, 1014 Lausanne Adm cant VD, 
agissant par la Direction générale des affaires institutionnelles et des communes (DGAIC) du canton de Vaud, Direction des affaires juridiques, place du Château 1, 1014 Lausanne. 
 
Objet 
recours abstrait contre l'art. 6 LMP/VD, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour constitutionnelle, du 1er mai 2023 (CCST.2022.0003). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. H.________ est une association de droit suisse qui regroupe des entreprises actives dans le secteur des services de l'emploi et, notamment, dans la location de personnel. Inscrite au registre du commerce du canton de Zurich depuis 1999, elle a notamment pour but la défense des intérêts économiques, politiques et juridiques de ses membres vis-à-vis des associations d'employeurs et de travailleurs, des entreprises, de l'État, des autorités et du public.  
A.________ SA, B.________ SA, C.________ SA, D.________ SA, E.________ SA, F.________ SA et G.________ SA sont pour leur part des sociétés actives dans le domaine de la location de personnel. Toutes sont basées dans le canton de Vaud. 
 
A.b. Le 15 novembre 2019, l'Autorité intercantonale pour les marchés publics a adopté le nouvel accord intercantonal sur les marchés publics (ci-après: l'AIMP 2019). Cet accord, qui a été élaboré parallèlement à la nouvelle loi fédérale sur les marchés publics du 21 juin 2019 (LMP), entrée en vigueur le 1er janvier 2021, a pour effet d'harmoniser autant que possible les règles en matière de marchés publics de la Confédération et des cantons, sans toucher à leurs compétences respectives.  
 
B.  
Après avoir approuvé l'adhésion du canton de Vaud à l'AIMP 2019 par décret du 31 mai 2022, le Grand Conseil vaudois a adopté, le 14 juin 2022, la loi cantonale de mise en oeuvre de cette convention intercantonale, à savoir la nouvelle loi sur les marchés publics (nLMP/VD), laquelle comporte une disposition spécifique sur la location de personnel. Le titre de cette disposition, qui se réfère expressément à l'art. 12 AIMP 2019, lequel traite lui-même du respect, par les soumissionnaires, des dispositions relatives à la protection des travailleurs et des conditions de travail, présente la teneur suivante: 
 
"Art. 6 - Location de personnel (art. 12 AIMP) 
1 Tout recours à la location de personnel par le soumissionnaire retenu ou ses sous-traitants doit être préalablement annoncé à l'adjudicateur pour contrôle et approbation. 
2 En cas d'urgence, l'annonce, le contrôle et l'approbation peuvent exceptionnellement être différés. Dans ce cas, l'annonce doit s'effectuer dans les plus brefs délais après l'entrée en fonction du personnel mis à disposition." 
Cette nouvelle loi cantonale vaudoise sur les marchés publics a été publiée dans la Feuille des avis officiels du canton de Vaud du 28 juin 2022. Le délai référendaire, qui courait jusqu'au 6 septembre 2022, n'a pas été utilisé. 
Le 15 juillet 2022, A.________ SA, B.________ SA, C.________ SA, D.________ SA, E.________ SA, F.________ SA et G.________ SA, ainsi que H.________ ont déposé une requête à la Cour constitutionnelle du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: la Cour constitutionnelle) par laquelle elles demandaient l'annulation de l'art. 6 nLMP/VD. 
Par arrêt du 1er mai 2023, la Cour constitutionnelle a rejeté la requête précitée après avoir délibéré en séance publique. 
 
C.  
Agissant conjointement, A.________ SA, B.________ SA, C.________ SA, D.________ SA, E.________ SA, F.________ SA et G.________ SA (ci-après: les recourantes 1 à 7), de même que H.________ (ci-après: la recourante 8), déposent un recours en matière de droit public devant le Tribunal fédéral. Les sociétés précitées et leur association faîtière demandent l'annulation de l'arrêt de la Cour constitutionnelle du 1er mai 2023 et l'annulation de l'art. 6 nLPM/VD. En outre, elles requièrent que l'effet suspensif soit octroyé à leur recours, en ce sens que la disposition précitée ne doit pas pouvoir entrer en vigueur avant que le Tribunal fédéral n'ait statué sur le fond de la cause. 
Par ordonnance du 28 juin 2023, la Présidente de la Cour de céans a admis la requête d'effet suspensif, compte tenu du fait, notamment, qu'aucune autorité cantonale ne s'était opposée à son octroi et que l'art. 6 nLMP/VD, contesté sur le fond, n'était pas encore entré en vigueur. 
La Cour constitutionnelle a renoncé à prendre position sur le recours. Dans sa réponse, le Grand Conseil, agissant par son bureau, conclut au rejet de celui-ci dans la mesure de sa recevabilité, tandis que le Conseil d'État, agissant par l'intermédiaire du Département cantonal des affaires institutionnelles et des communes, a renoncé à déposer ses propres déterminations, se ralliant à celles du Grand Conseil. 
Les recourantes ont répliqué, tandis que le Grand Conseil a déposé d'ultimes observations spontanées. 
 
 
Considérant en droit :  
 
I. Recevabilité, pouvoir de cognition et objet du litige  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (cf. ATF 148 I 160 consid. 1.1). 
 
1.1. L'art. 82 let. b LTF prévoit que le Tribunal fédéral connaît des recours dirigés contre un acte normatif cantonal par la voie du recours en matière de droit public. D'après l'art. 87 al. 1 LTF, un tel recours est directement recevable contre les actes normatifs cantonaux ne pouvant faire l'objet d'aucun recours cantonal. En revanche, si le droit cantonal instaure une voie de recours au niveau cantonal contre de tels actes normatifs, un recours au Tribunal fédéral n'est possible que contre la décision de l'autorité cantonale ayant statué sur le recours abstrait en dernière instance cantonale, conformément à l'art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF, auquel renvoie l'art. 87 al. 2 LTF.  
En l'occurrence, sur le fond, le recours tend à l'annulation de l'art. 6 de la nouvelle loi vaudoise sur les marchés publics du 14 juin 2022 (nLMP/VD; RS/VD 726.01), c'est-à-dire à l'annulation d'un acte normatif cantonal susceptible d'être directement attaqué devant la Cour constitutionnelle du Tribunal cantonal vaudois (art. 136 al. 2 let. a de la Constitution du Canton de Vaud du 14 avril 2003 [RS 131.231] et art. 3 al. 2 let. a de la loi du 5 octobre 2004 sur la juridiction constitutionnelle [LJC/VD; RS/VD 173.32]). Les recourantes ont en l'occurrence saisi cette autorité qui, statuant en tant que dernière instance cantonale, a confirmé la conformité de l'art. 6 nLMP/VD au droit supérieur. Il s'ensuit que les instances précédentes ont été épuisées en la cause et que, dès lors, l'arrêt attaqué, qui constitue une décision finale (art. 90 LTF), est susceptible d'être contesté par la voie du recours en matière de droit public. Il est ici précisé que l'art. 83 LTF, qui restreint cette voie de droit dans certains domaines juridiques déterminés - y compris celui des marchés publics (cf. art. 83 let. f LTF) - ne s'applique pas aux situations de recours abstraits (cf. ATF 145 I 26 consid. 1.1). 
 
1.2. L'art. 89 al. 1 LTF confère la qualité pour former un recours en matière de droit public à quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a), est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué (let. b) et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (let. c). Lorsque l'acte attaqué est un acte normatif, l'intérêt personnel requis peut être simplement virtuel; il suffit qu'il existe un minimum de vraisemblance que la partie recourante puisse se voir un jour appliquer les dispositions contestées (cf. notamment ATF 138 I 435 consid. 1.6 et arrêt 2C_664/2016 du 25 mars 2020 consid. 1.7.1, non publié in ATF 147 I 16). Quant à l'intérêt digne de protection, il n'est pas nécessaire qu'il soit de nature juridique, un intérêt de fait étant suffisant (ATF 141 I 78 consid. 3.1; 136 I 49 consid. 2.1). La jurisprudence admet enfin qu'une association jouissant de la personnalité juridique, qui n'a pas elle-même d'intérêt personnel digne de protection à l'issue de la cause, peut agir par la voie du recours en matière de droit public - sous la forme d'un recours dit "corporatif égoïste" - si elle a pour but statutaire la défense des intérêts dignes de protection de ses membres, si ces intérêts sont communs à la majorité ou au moins à un grand nombre d'entre eux et, enfin, si chacun de ceux-ci aurait qualité pour s'en prévaloir à titre individuel (cf. arrêt 2C_196/2023 du 7 février 2024 consid. 4.4, destiné à la publication; ATF 137 II 40 consid. 2.6.4).  
En l'occurrence, l'art. 6 nLMP/VD litigieux prévoit que les entreprises qui se sont vu adjuger un marché public vaudois, de même que leurs sous-traitants, doivent annoncer au pouvoir adjudicateur leur intention de recourir à la location de personnel pour l'exécution dudit marché, ce afin que l'autorité puisse contrôler et approuver un tel procédé. Comme on le verra, la Cour constitutionnelle a considéré que cette norme devait être interprétée en ce sens que l'autorité adjudicatrice doit mettre son veto au projet de location de services chaque fois que l'entreprise bailleresse avec laquelle une collaboration est envisagée s'avère ne pas être "en règle" en matière de conditions de travail, par exemple parce qu'elle ne respecterait pas les conventions collectives de travail qui lui sont applicables (cf. infra consid. 6.5 et 7.3). Appliqué de cette manière, l'art. 6 nLMP/VD pourrait assurément constituer un obstacle juridique à l'activité des entreprises de location de services, en ce sens que celles-ci pourraient être empêchées, dans certaines circonstances, de louer des travailleurs temporaires pour l'exécution de marchés publics vaudois. Sur la base de ce constat, il faut reconnaître que les recourantes 1 à 7, qui sont toutes des entreprises de location de services actives dans le canton de Vaud, peuvent se prévaloir d'un intérêt virtuel digne de protection à l'annulation de l'art. 6 nLMP/VD et qu'elles ont donc qualité pour recourir en la cause, sachant qu'elles étaient déjà parties devant l'autorité précédente.  
Il y a également lieu d'admettre la qualité pour recourir de la recourante 8, qui constitue l'association faîtière des entreprises suisse de location de services. Certes, cette association n'est pas elle-même touchée par l'arrêt entrepris et par l'art. 6 nLMP/VD. L'arrêt attaqué constate toutefois qu'elle a pour but statutaire la défense de l'intérêt de ses membres, lesquels sont toutes des entreprises actives dans le secteur des services de l'emploi. Il apparaît par ailleurs qu'une majorité ou, à tout le moins, un grand nombre de celles-ci peuvent - à l'instar des recourantes 1 à 7 - se prévaloir d'un intérêt virtuel à l'annulation de l'art. 6 nLMP/VD dans la mesure où il est vraisemblable que cette disposition pourrait les empêcher à développer des activités dans le canton de Vaud, en les empêchant, dans certaines circonstances, d'y louer des travailleurs temporaires pour l'exécution de marchés publics. La qualité pour agir de la recourante 8 doit donc être reconnue en application de l'article 89 al. 1 LTF et de la jurisprudence sur le recours corporatif égoïste (cf., pour un cas similaire, arrêt 2C_661/2019 du 17 mars 2021 consid. 1.4.1). 
 
1.3. Pour le surplus, le recours a été interjeté dans les formes requises (art. 42 LTF) et dans les trente jours qui ont suivi la notification de l'arrêt attaqué (art. 100 al. 1 LTF; cf. arrêt 2C_773/2017 du 13 mai 2019 consid. 1.4, qui précise que l'art. 101 LTF relatif au calcul du délai en matière de recours abstrait au Tribunal fédéral ne s'applique pas lorsqu'une cour constitutionnelle cantonale a statué au préalable). Il est donc recevable.  
 
2.  
 
2.1. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il vérifie librement la bonne application du droit fédéral, international et intercantonal, de même que celle des droits constitutionnels cantonaux (cf. art. 95 let. a, b, c et e LTF). Toutefois, conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, il n'examine la question de la violation des droits constitutionnels cantonaux et du droit intercantonal que si ce grief a été invoqué et motivé par le recourant.  
 
2.2. Dans le cadre d'un contrôle abstrait des normes cantonales, le Tribunal fédéral s'impose une certaine retenue eu égard notamment aux principes découlant du fédéralisme et à la proportionnalité. Dans ce contexte, il est décisif que la norme mise en cause puisse, d'après les principes d'interprétation reconnus, se voir attribuer un sens compatible avec les dispositions du droit supérieur invoquées (cf. ATF 148 I 160 consid. 2; 145 I 73 consid. 2). Pour en juger, il faut notamment tenir compte de la portée de l'atteinte aux droits fondamentaux invoqués, de la possibilité d'obtenir ultérieurement, par un contrôle concret de la norme, une protection juridique suffisante, ainsi que des circonstances dans lesquelles ladite norme sera appliquée (ATF 148 I 160 consid. 2; 144 I 306 consid. 2; 140 I 2 consid. 4). Ce faisant, le juge ne doit pas se borner à traiter le problème de manière purement abstraite, mais il lui incombe de prendre en compte dans son analyse la vraisemblance d'une application conforme au droit supérieur. Les explications de l'autorité cantonale sur la manière dont elle envisage d'appliquer la disposition contestée doivent également être prises en considération. Si une réglementation de portée générale apparaît comme défendable au regard des droits fondamentaux en cause dans des situations normales, telles que le législateur pouvait les prévoir, l'éventualité que, dans certains cas, son application puisse se révéler contraire aux droits fondamentaux ne saurait en principe justifier une intervention du juge au stade du contrôle abstrait des normes (cf. ATF 148 I 160 consid. 2; 145 I 73 consid. 2; 140 I 2 consid. 4).  
 
2.3. Lorsque le droit cantonal instaure, comme en l'espèce, une voie de recours contre les actes normatifs cantonaux et qu'une juridiction constitutionnelle cantonale a, dans le cadre d'un contrôle abstrait, constaté des faits, le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits constatés par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF (cf. ATF 148 I 160 consid. 3). Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours ne peut ainsi critiquer les constatations de fait que si celles-ci ont été opérées de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (ATF 142 II 355 consid. 6; 139 II 373 consid. 1.6). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, la partie recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. À défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui qui est contenu dans l'acte attaqué (ATF 148 I 160 consid. 3). Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF).  
En l'occurrence, conformément à ce qui précède et compte tenu, en particulier, de l'interdiction des pièces nouvelles, la Cour de céans ne tiendra pas compte du document, daté du 19 juin 2023, que les recourantes ont produit à l'appui de leur réplique du 7 septembre 2023 en déclarant vouloir démontrer que l'art. 6 nLMP/VD ne pourrait, en pratique, pas être mis en oeuvre de manière satisfaisante. 
 
3.  
Les recourantes contestent l'art. 6 de la nouvelle loi cantonale vaudoise sur les marchés publics (nLMP/VD). Le Grand Conseil a procédé à une révision totale de cette loi le 14 juin 2022 afin de mettre en oeuvre l'accord intercantonal du 15 novembre 2019 sur les marchés publics (AIMP 2019; RS/VD 726.91), auquel le canton de Vaud a adhéré avec effet au 1er janvier 2023. En l'occurrence, la norme légale litigieuse, qui renvoie dans son titre à l'art. 12 AIMP 2019 (cf. s'agissant de cette disposition, infra consid. 6.2), prévoit, à son premier alinéa, que " [tout] recours à la location de personnel par le soumissionnaire retenu ou ses sous-traitants doit être préalablement annoncé à l'adjudicateur pour contrôle et approbation ". Une exception à cette obligation n'entre en ligne de compte qu'en cas d'urgence; dans ce dernier cas, le contrôle et l'approbation peuvent être différés, non sans être effectués dans les plus brefs délais après l'entrée en fonction du personnel mis à disposition (cf. art. 6 al. 2 nLMP/VD; cf. supra let. B).  
La Cour constitutionnelle a estimé que cette norme ne restreignait pas la liberté économique des entreprises de location de services, tout en soulignant à titre subsidiaire qu'elle constituerait de toute manière une atteinte admissible à ce droit sous l'angle de l'art. 36 Cst. Elle a également considéré que la disposition cantonale respectait le droit supérieur et, notamment, la loi fédérale du 6 octobre 1989 sur le service de l'emploi et la location de services (LSE; RS 823.11) et qu'elle était, partant, conforme au principe de la primauté du droit fédéral inscrit à l'art. 49 al. 1 Cst. 
 
II. Mesures d'instruction et contestation de l'établissement des faits  
 
4.  
Dans leurs écritures, les recourantes se plaignent du fait que le "contre-rapport" de l'un des juges cantonaux minorisé lors de la délibération publique de la Cour constitutionnelle ne figure ni dans l'arrêt attaqué ni au dossier. Elles requièrent dès lors que la Cour de céans en ordonne la production. 
 
4.1. Le Tribunal fédéral est appelé à contrôler la conformité au droit des décisions attaquées devant lui sur la base des faits qui y sont constatés, si bien que la décision attaquée constitue l'une des pièces centrales du dossier qui doit être annexée au recours (cf. art. 42 al. 3 LTF). Or, le droit cantonal vaudois a comme caractéristique d'autoriser les juges du Tribunal cantonal à exprimer d'éventuels avis minoritaires dans les jugements et arrêts auxquels ils ont participé (cf. art. 134 de la Constitution du canton de Vaud du 14 avril 2003 [Cst./VD; RS 131.231]). Il ne s'agit toutefois nullement d'une obligation, mais d'une simple faculté qui est donnée aux juges cantonaux, indépendamment d'une éventuelle délibération publique d'ailleurs. Seul le juge qui le souhaite peut rédiger un avis minoritaire appelé à être annexé au jugement ou à l'arrêt dans les dix jours qui suivent la signature de celui-ci par le président et, le cas échéant, par le greffier (cf. art. 78 al. 4 du règlement organique du Tribunal cantonal du 13 novembre 2007 [ROTC/VD; RS/VD 173.31.1]).  
 
4.2. Il résulte de ce qui précède qu'au sens du droit cantonal vaudois, le contre-rapport qu'un juge cantonal peut soutenir lors d'une délibération publique, sans parvenir à rallier une majorité autour de lui, peut, sur le principe, faire l'objet d'une opinion dissidente annexée à l'arrêt final. La publication d'un tel complément dépend toutefois de la seule volonté du juge concerné. Si aucun avis dissident n'a été joint au jugement, c'est que la procédure prévue aux art. 134 Cst./VD et 78 du règlement organique du Tribunal cantonal n'a pas été mise en oeuvre. Les recourantes ne sauraient dès lors exiger la production de l'opinion du juge minoritaire exprimée lors des débats publics, sachant que celui-ci n'a pas souhaité la faire publier en annexe de l'arrêt attaqué. Au demeurant, un tel avis minoritaire n'a de toute manière aucune portée juridique propre en tant qu'il ne modifie en rien les considérants et le dispositif de l'arrêt qu'il concerne (cf., à ce dernier propos, arrêts 4A_319/2015 du 5 janvier 2016 consid. 4.2.2; 4A_584/2009 du 18 mars 2010 consid. 3.3; 4P.23/1991 du 25 mai 1992 consid. 2b).  
 
5.  
Les recourantes soulèvent deux griefs en lien avec la constatation des faits opérée par la Cour constitutionnelle. 
 
5.1. Premièrement, les recourantes reprochent à l'autorité précédente d'être tombée dans l'arbitraire et d'avoir violé leur droit d'être entendues en retenant que le nouvel art. 6 nLMP/VD ne dissuadera probablement pas les entreprises adjudicataires d'un marché public vaudois de recourir à de la main d'oeuvre temporaire au moment de la réalisation de celui-ci. Elles affirment qu'un tel constat, qui ne repose sur aucune mesure d'instruction particulière, est contredit par un sondage produit au dossier et mené par la recourante 8 auprès de différents acteurs de la branche.  
 
5.1.1. Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. confère à tout administré le droit de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 II 218 consid. 2.3 et les références citées). L'autorité peut cependant renoncer à procéder à des mesures d'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 et les références citées).  
En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des conclusions insoutenables (ATF 143 IV 500 consid. 1.1 et les références citées). 
 
5.1.2. La Cour de céans relève que la Cour constitutionnelle a opéré deux constats liminaires avant de retenir que l'art. 6 nLMP/VD n'aurait vraisemblablement aucun effet sur la fréquence et l'ampleur du recours au travail intérimaire lors de l'exécution des marchés publics vaudois. Elle a considéré, en premier lieu, que la disposition litigieuse n'interdisait pas le recours à la location de services pour l'exécution de tels marchés; elle se limitait à obliger les entreprises adjudicataires et leurs éventuels sous-traitants à annoncer leur intention de faire appel à des travailleurs intérimaires au moment de commencer à exécuter un marché public. Selon les juges précédents, le but de l'art. 6 nLMP/VD est que le pouvoir adjudicateur puisse vérifier que l'entreprise de location de services avec laquelle une collaboration est envisagée est bien "en règle" en matière de conditions de travail et, si tel n'est pas le cas, d'obliger l'adjudicataire ou ses sous-traitants à s'adresser à une autre société de location de services. La Cour constitutionnelle a enfin estimé, en second lieu, que la réalisation de marchés publics ne pourra jamais se passer totalement des travailleurs temporaires, dès lors que les entreprises soumissionnaires - notamment dans le domaine de la construction - ne gardent généralement pas en réserve une partie de leur personnel fixe dans l'attente d'une adjudication et que le recours à la sous-traitance leur offre généralement moins de flexibilité.  
Au regard de ces deux postulats, non contestés par les recourantes, il n'est pas insoutenable de retenir, à l'instar de la Cour constitutionnelle, que l'exigence d'annonce et de contrôle posée à l'art. 6 nLMP/VD n'influencera vraisemblablement pas les entreprises dans leur décision d'engager ou non des travailleurs intérimaires lors de l'exécution de marchés publics vaudois, sachant qu'ils continueront à avoir intérêt à employer - si ce n'est besoin - de tels travailleurs. Il en va d'autant plus ainsi que la disposition prévoit, comme on l'a dit, une possibilité d'annonce différée en cas d'urgence. Un tel constat n'apparaît en tout cas pas manifestement inexact aux seuls motifs que la mise en oeuvre concrète de la nouvelle réglementation cantonale recèlerait encore certaines zones d'ombres et qu'il serait contredit par un sondage que la recourante 8 a effectué pour les besoins de la procédure auprès de ses membres, qui sont par définition des sociétés de travail temporaire et non des entreprises représentant des soumissionnaires potentiels. On ne voit pas non plus que la Cour constitutionnelle aurait procédé à une appréciation anticipée des preuves arbitraire, contrevenant au droit à la preuve, en refusant les mesures d'instructions réclamées par les recourantes, comme l'établissement d'une expertise destinée à évaluer l'effet économique potentielle de l'art. 6 nLMP/VD. Il n'est en effet pas manifestement insoutenable de considérer que l'administration d'une expertise ne remettrait de toute manière pas fondamentalement en question la projection selon laquelle la procédure d'annonce et de contrôle imposée par le droit cantonal n'est pas propre à décourager les entreprises adjudicataires à avoir recours à la location de personnel lors de l'exécution d'un marché public vaudois. En effet, telle qu'envisagée par l'arrêt attaqué, cette procédure tend uniquement à empêcher la collaboration avec des sociétés bailleresses de personnel qui ne seraient pas "en règle" en matière de conditions de travail, sans interdire des partenariats avec d'autres entreprises de location de services. Une telle conclusion s'impose d'autant plus en l'espèce que, comme on l'a déjà dit, les recourantes ne contestent pas le fait, constaté dans l'arrêt attaqué, que de nombreuses entreprises soumissionnaires ne peuvent pas se passer des travailleurs temporaires et que la location de personnel continuera de présenter de nombreux avantages par rapport à la sous-traitance. 
 
5.2. Les recourantes reprochent enfin à la Cour constitutionnelle de s'être fondée sur les déclarations d'un seul conseiller d'État pour retenir qu'il était déjà arrivé que des entreprises de location de services impliquées dans la réalisation de marchés publics ne respectent pas les conditions de travail applicables à leurs travailleurs intérimaires. Elles y voient une assertion arbitraire de l'autorité précédente, qui, avant d'aboutir à un tel constat, aurait dû solliciter la production de documents établissant des situations d'abus de la part d'entreprises de location de services en lien, précisément, avec l'exécution de marchés publics.  
Par leurs critiques, les recourantes ne démontrent aucun arbitraire dans l'établissement des faits. Le rapport de la Commission parlementaire ayant examiné le projet de nouvelle loi cantonale vaudoise sur les marchés publics relate effectivement que le conseiller d'État en charge du projet a déclaré devant ladite commission que l'État avait déjà été confronté à des situations où des entreprises de location de services ne respectaient pas les conditions de travail applicables à leurs travailleurs. Il ressort par ailleurs de l'arrêt attaqué que les recourantes ont admis en cours de procédure cantonale que de nombreuses entreprises bailleresses de services étaient susceptibles d'avoir été déjà sanctionnées par une commission paritaire pour non-respect des conditions de travail. Elles évoquent du reste le risque d'être elles-mêmes sanctionnées pour non-respect des conventions collectives de travail susceptibles de leur être applicables. Sur cette base, il n'est pas manifestement insoutenable de retenir qu'il peut arriver que les conditions de travail ne soient pas systématiquement respectées lors de l'engagement de travailleurs intérimaires en vue de l'exécution d'un marché public. 
 
5.3. Il s'ensuit que le recours est mal fondé en tant qu'il conteste l'établissement des faits opéré par la Cour constitutionnelle, lequel ne viole ni l'interdiction de l'arbitraire consacrée à l'art. 9 al. 1 Cst, ni le droit d'être entendu des recourantes protégé par l'art. 29 al. 2 Cst.  
 
III. Principe de primauté du droit fédéral  
 
6.  
Les recourantes soutiennent que l'art. 6 nLMP/VD serait contraire au principe de la primauté du droit fédéral consacré à l'art. 49 al. 1 Cst. Elles estiment que cette disposition de droit cantonal contreviendrait en particulier à la loi sur le service de l'emploi et la location de services (LSE; RS 823.11) qui contiendrait une réglementation exhaustive en matière de protection des travailleurs intérimaires. 
 
6.1. Selon l'art. 3 Cst., les cantons sont souverains en tant que leur souveraineté n'est pas limitée par la Constitution fédérale et exercent tous les droits qui ne sont pas délégués à la Confédération. Ils peuvent ainsi définir les tâches qu'ils accomplissent dans le cadre de leurs compétences (art. 43 Cst.). Le principe de la primauté du droit fédéral garanti à l'art. 49 al. 1 Cst. fait toutefois obstacle à l'adoption ou à l'application de règles cantonales qui éludent des prescriptions de droit fédéral ou qui en contredisent le sens ou l'esprit, notamment par leur but ou par les moyens qu'elles mettent en oeuvre, ou qui empiètent sur des matières que le législateur fédéral a réglementées de façon exhaustive (cf. ATF 143 I 403 consid. 7.1; 133 I 110 consid. 4.1; 130 I 82 consid. 2.2 et les arrêts cités). L'existence ou l'absence d'une législation fédérale exhaustive constitue donc le premier critère pour déterminer s'il y a conflit avec une règle cantonale. Toutefois, même si la législation fédérale est considérée comme exhaustive dans un domaine donné, une loi cantonale peut subsister dans le même domaine si elle poursuit un autre but que celui recherché par le droit fédéral (ATF 143 I 403 consid. 7.1; 138 I 435 consid. 3.1; 133 I 110 consid. 4.1). Le principe de la force dérogatoire n'est pas non plus violé dans la mesure où la loi cantonale vient renforcer l'efficacité de la réglementation fédérale (cf. ATF 133 I 110 consid. 4.1; 91 I 17 consid. 5). Ce n'est que lorsque la législation fédérale exclut toute réglementation dans un domaine particulier que le canton perd la compétence d'adopter des dispositions complétives quand bien même celles-ci ne contrediraient pas le droit fédéral ou seraient même en accord avec celui-ci (cf. ATF 143 I 403 consid. 7.1; 143 I 109 consid. 4.2.2; 141 V 455 consid. 6.1; 140 I 218 consid. 5.1; 140 II 46 consid. 2.5.1; 139 I 242 consid. 3.2).  
 
6.2. De manière générale, la réglementation sur les marchés publics, dont relève l'art. 6 nLMP/VD au centre du litige, représente une compétence parallèle entre la Confédération et les cantons (cf. ATF 130 I 156 consid. 2.6). Pour la Confédération, il s'agit d'une compétence inhérente ou implicite rappelée à l'art. 164 al. 1 let. g Cst.: l'État fédéral doit être à même de faire les acquisitions et de requérir les services nécessaires à l'exercice des tâches qui lui sont attribuées par la Constitution et par le droit international (cf. notamment l'art. 81 Cst. concernant les travaux publics). Pour les cantons, cela résulte de la clause générale de l'art. 3 Cst.: les cantons sont compétents pour réglementer la passation de leurs propres marchés, sous réserve du respect des accords internationaux (art. 5 al. 4 Cst.; ATF 130 I 156 consid. 2.6). Ils ont exercé cette compétence en adoptant des règles intercantonales communes. Celles-ci ont été récemment révisées parallèlement à la nouvelle loi fédérale du 21 juin 2019 sur les marchés publics (LMP; RS 172.056.1) par l'Autorité intercantonale pour les marchés publics qui a édicté l'AIMP 2019, auquel le Canton de Vaud a adhéré le 31 mai 2022 (RS/VD 726.91). Cet accord laisse pour sa part les cantons expressément libres d'édicter, dans le respect des engagements internationaux de la Suisse, des dispositions d'exécution en lien, notamment, avec son art. 12 qui prévoit que " [l]es marchés publics portant sur des prestations à exécuter en Suisse ne sont adjugés qu'à des soumissionnaires qui respectent les dispositions relatives à la protection des travailleurs et les conditions de travail en vigueur en Suisse, les obligations en matière d'annonce et d'autorisation mentionnées dans la loi du 17 juin 2005 sur le travail au noir (LTN; RS 822.41) ainsi que les dispositions relatives à l'égalité de traitement salarial entre femmes et hommes " (cf. art. 63 al. 4 AIMP 2019 en lien avec l'art. 12 al. 1 AIMP 2019).  
Il est ainsi incontestable que, considéré pour lui-même, l'art. 6 nLMP/VD, qui renvoie à l'art. 12 AIMP 2019 et qui oblige tout soumissionnaire retenu à annoncer au pouvoir adjudicateur son intention de recourir à la location de personnel pour réaliser le marché qui lui a été attribué, entre dans le champ de compétences des cantons. Reste à déterminer si cette disposition viole le principe de la primauté du droit fédéral en contrevenant à des normes que la Confédération aurait adoptées dans ses propres domaines de compétence, comme le prétendent les recourantes en se référant à la réglementation fédérale en matière de location de services et de protection des travailleurs. 
 
6.3. Le 6 octobre 1989, le législateur fédéral a adopté la loi fédérale sur le service de l'emploi et la location de services (LSE) en se fondant sur ses compétences en matière de réglementation de l'exercice des activités économiques privées, de protection des travailleurs et de service de placement, ainsi que de droit civil et de droit pénal (en référence aux art. 31bis al. 2, 34ter al. 1 let. a et e, 64 al. 2 et 64bis de l'ancienne Constitution fédérale du 29 mai 1874, correspondant actuellement, respectivement, aux art. 95 al. 1, 110 al. 1 let. a et c, 122 al. 1 et 123 al. 1 Cst.). Cette loi a notamment pour but de régir la location de services et de protéger les travailleurs qui y recourent (art. 1 let. a et c LSE). A cette fin, elle réglemente la location de services de manière assez détaillée, lui consacrant onze articles spécifiques (cf. art. 12 à 22 LSE), sans compter les dispositions générales relatives aux autorités, aux voies de recours et aux dispositions pénales (cf. chap. 6 à 8 LSE). Cette réglementation, complétée par l'ordonnance du 16 janvier 1991 sur le service de l'emploi et la location de services (Ordonnance sur le service de l'emploi, OSE; RS 823.111), impose en particulier aux bailleurs de services un régime d'autorisation obligatoire (art. 12 ss LSE; 26 à 34a OSE), les astreint à fournir des sûretés (art. 14 LSE; 35 à 40 OSA) et les soumet à une obligation de renseigner (art. 17 LSE). Elle réglemente par ailleurs strictement la publication d'offres d'emploi (art. 18 LSE; 46 s. OSA), la forme et le contenu du contrat de travail conclu entre le bailleur de services et le travailleur (art. 19 s. LSE; 48 à 49 OSE), ainsi que le contrat de location de services entre le bailleur et l'entreprise locataire (art. 22 LSE).  
Dans un ATF 120 Ia 89, le Tribunal fédéral a estimé que la LSE réglait de manière exhaustive non seulement la police du commerce en matière de location de services (art. 95 al. 1 Cst.), mais aussi la protection des travailleurs dans les opérations de location de services (cf. art. 110 al. 1 let. a Cst.; arrêt précité consid. 2c et 2d). Il en a déduit qu'il ne subsistait dès lors plus aucune compétence cantonale pour régler les conditions de travail dans le domaine de la location de services, même s'il s'agissait d'assurer une meilleure protection des travailleurs intérimaires que ne le fait déjà le droit fédéral (cf. ATF 120 Ia 89 consid. 3d et 3e). 
 
6.4. Il découle de ce qui précède que la loi fédérale sur le service de l'emploi et la location de services (LSE) contient une réglementation complète et exhaustive sur deux plans au moins: d'une part en ce qui concerne les conditions dans lesquelles une entreprise peut exercer la location de services à titre commercial et d'autre part en ce qui concerne la protection des travailleurs intérimaires. Cela étant, le simple fait que la législation fédérale présente un caractère exhaustif sur ces deux points ne signifie pas encore que les cantons soient totalement empêchés d'adopter des dispositions qui peuvent toucher les entreprises de location de services sur la base de leurs compétences en matière de réglementation des marchés publics. Comme on l'a vu (cf. supra consid. 6.1), la jurisprudence admet que de telles normes puissent être adoptées et subsister si elles poursuivent un autre but que celui recherché par la réglementation fédérale considérée comme exhaustive (cf. infra consid. 6.5 à 6.7) et si elles ne contredisent pas d'une autre manière le sens ou l'esprit de l'une de ses normes (cf. infra consid. 6.8), ce qu'il convient donc d'examiner.  
 
6.5. Le but poursuivi par l'art. 6 nLMP/VD ne ressort pas explicitement du texte de la norme, qui prévoit que "[t]out recours à la location de personnel par le soumissionnaire retenu ou ses sous-traitants doit être préalablement annoncé à l'adjudicateur pour contrôle et approbation". Se fondant sur les travaux préparatoires de la nouvelle loi vaudoise, la Cour constitutionnelle a cependant retenu qu'en introduisant une telle procédure d'annonce et d'approbation, le législateur n'avait pas pour intention de proscrire ou de limiter le recours au travail temporaire, mais uniquement d'interdire aux entreprises adjudicataires et à leurs éventuels sous-traitants d'engager des travailleurs intérimaires par le biais d'entreprises de location de services ne s'avérant pas être "en règle" sur le plan du respect des conditions de travail. L'autorité précédente a ainsi souligné que le but premier de l'art. 6 nLMP/VD n'était pas d'améliorer la protection des travailleurs; il consistait avant tout à s'assurer que tous les participants à la réalisation d'un marché public respectent les conditions de travail en vigueur en Suisse, y compris les entreprises de location de services pouvant intervenir sur demande des soumissionnaires retenus, ce dans l'idée d'éviter au maximum tout dumping salarial ou social et de garantir de cette manière une concurrence efficace et équitable dans le cadre des procédures de passation de marchés publics dans le canton de Vaud.  
 
6.6. Il faut convenir avec l'autorité précédente que les entreprises qui ne respectent pas les dispositions impératives du code des obligations concernant le contrat de travail, les dispositions normatives contenues dans les conventions collectives et les contrats-types de travail ou, à défaut, les conditions de travail usuelles dans la région et dans la branche - ou qui s'adressent à des sous-traitants qui adoptent un tel comportement - sont susceptibles de jouir d'un avantage concurrentiel illégal sur le marché leur permettant de proposer des offres plus avantageuses que les entreprises qui respectent, elles, les standards en question (cf. dans ce sens notamment GALLI ET AL., Praxis des öffentlichen Beschaffungsrechts, 3e éd. 2013, n. 514). Il est ainsi admis que la concurrence entre soumissionnaires dans le domaine des marchés publics ne peut fonctionner correctement que si les participants à la procédure se conforment aux prescriptions minimales en matière de protection des travailleurs et s'ils ne pratiquent aucune sous-enchère abusive en matière de conditions de travail propre à entraîner une distorsion de concurrence entre eux (cf. Message du 15 février 2017 concernant la révision totale de la loi fédérale sur les marchés publics, FF 2017 1695, spéc. p. 1756). Le droit suisse des marchés publics prévoit en ce sens que les soumissionnaires et leurs sous-traitants doivent respecter les dispositions relatives à la protection des travailleurs et les conditions de travail en vigueur en Suisse, sous menace, notamment, de ne pas pouvoir participer à une procédure de marché public ou de voir la décision d'adjudication dont ils ont bénéficié révoquée (cf. art. 12 al. 1 et 4, 26 al. 1, 44 al. 1 let. a et al. 2 let. f et 45 LMP/AIMP 2019). Notons que la doctrine considère qu'il s'agit bien là de règles destinées à assurer une concurrence juste et efficace entre soumissionnaires, et non à protéger les travailleurs (cf. PANDORA KUNZ-NOTTER, in: Hans Rudolf Trüeb [édit.], Handkommentar zum Schweizerischen Beschaffungsrecht, 2020, n. 1 ad art. 12 LMP; GALLI ET AL., op. cit., n. 514). Du reste, ces règles ne modifient pas matériellement les règles de protection des travailleurs, mais tendent simplement à en garantir le respect dans le domaine des marchés publics, ce qui ne saurait aller à l'encontre de l'art. 49 Cst.  
 
6.7. Rien ne justifie d'apprécier différemment une norme qui, comme l'art. 6 nLMP/VD, complète la réglementation existante en empêchant que des soumissionnaires ne réalisent un marché public avec l'aide de sociétés de location de services peu respectueuses des conditions de travail applicables à leurs travailleurs intérimaires. Le recours à de telles sociétés - qui existent en pratique comme l'a constaté la Cour constitutionnelle (cf. supra consid. 5.2) - est en effet susceptible de procurer un avantage concurrentiel illégal aux entreprises soumissionnaires intéressées, qui, au moment d'établir leurs offres, peuvent tabler sur des coûts moins élevés en matière de location de services qu'elles ne pourraient le faire en envisageant une collaboration avec une société respectant les conditions de travail. On peut donc admettre que l'art. 6 nLMP/VD tend à assurer une concurrence efficace et équitable lors de futures procédures de passation de marchés publics dans le canton de Vaud et qu'il vise, sous cet angle, un autre but que celui de la protection des travailleurs intérimaires, exhaustivement réglée par la LSE, quand bien même il peut avoir pour effet d'en renforcer l'efficacité. Comme on l'a vu (cf. supra consid. 6.1), cet effet indirect est admis sous l'angle du principe de primauté du droit fédéral, dès lors que rien n'indique en l'espèce qu'en adoptant la LSE, le législateur fédéral aurait voulu empêcher l'adoption de toutes autres mesures cantonales qui, sans avoir pour but principal de protéger les travailleurs intérimaires, auraient accessoirement un effet protecteur pour ceux-ci.  
 
6.8. Rien ne permet enfin de retenir que l'art. 6 nLMP/VD aurait pour effet d'éluder une prescription précise de la LSE ou d'en contredire le sens ou l'esprit. L'obligation d'annonce et d'approbation prévue par le législateur vaudois n'interdit effectivement pas tout recours au travail intérimaire lors de l'exécution d'un marché public relevant du droit vaudois. Il n'a même pas pour effet pratique de le rendre moins attractif, comme l'a constaté la Cour constitutionnelle (cf. supra consid. 5.2). L'art. 6 nLMP/VD, tel qu'interprété par celle-ci, tend en fin de compte seulement à empêcher que les soumissionnaires retenus, ainsi que leurs éventuels sous-traitants, ne réalisent des marchés publics avec l'assistance d'entreprises de location de services qui ne seraient pas en règle en matière de respect des conditions de travail. On ne voit dès lors pas que l'art. 6 nLMP/VD fasse obstacle au choix du législateur fédéral d'autoriser, à certaines conditions, la location de services en Suisse, ni avec le droit des entreprises de location de services d'exercer leurs activités partout en Suisse dès l'obtention de leur autorisation d'exploiter (cf. art. 15 al. 1 LSE). Les recourantes ne prétendent d'ailleurs pas le contraire dans leurs écritures. Ces dernières soutiennent uniquement que l'art. 6 nLMP/VD serait contraire à l'art. 20 LSE qui, d'après elles, réglerait de manière exhaustive la question des sanctions susceptibles d'être infligées aux entreprises de location de services non respectueuses des conditions de travail applicables à leurs travailleurs intérimaires, et parmi lesquelles ne figurent pas l'interdiction de participer à l'exécution d'un marché public. En formulant un tel grief, les recourantes perdent toutefois de vue que, comme on vient de le dire (cf. supra consid. 6.2 et 6.6), le droit cantonal ne contrevient pas au droit fédéral, même considéré comme exhaustif dans un domaine donné, lorsqu'il vise un autre but que lui, ce qui est le cas de l'art. 6 nLMP/VD.  
 
6.9. Partant, le recours est mal fondé en tant qu'il soutient que l'art. 6 nLMP/VD violerait le principe de la primauté du droit fédéral ancré à l'art. 49 al. 1 Cst.  
 
IV. Principe de la légalité et liberté économique  
 
7.  
Les recourantes se plaignent enfin d'une violation de leur liberté économique, protégée par l'art. 27 Cst., ainsi que du principe de la légalité ancré à l'art. 5 al. 1 Cst. Elles soutiennent en particulier que l'art. 6 nLMP/VD ne constituerait pas une base légale suffisamment précise pour justifier une restriction de leur droit de proposer librement leurs services à des entreprises s'étant vu attribuer l'exécution de marchés publics vaudois. 
 
7.1. Aux termes de l'art. 27 Cst., la liberté économique est garantie (al. 1). Elle comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à une activité économique lucrative privée et son libre exercice (al. 2). Cette liberté protège toute activité économique privée, exercée à titre professionnel et tendant à la production d'un gain ou d'un revenu (cf. ATF 143 II 598 consid. 5.1; 143 I 403 consid. 5.6.1).  
En l'occurrence, dans l'arrêt attaqué, la Cour constitutionnelle a considéré que l'art. 6 nLMP/VD ne portait pas atteinte au libre exercice de l'activité économique des sociétés de location de services telles que les recourantes 1 à 7. Elle soutient que ces entreprises ne seraient pas les destinataires du devoir d'annonce prévu par le droit cantonal, qui, sous cet angle, ne leur imposerait aucune nouvelle obligation. Il n'en demeure pas moins que l'autorité précédente a également souligné que, dans le cadre de cette procédure d'annonce et de contrôle, le pouvoir adjudicateur devrait systématiquement vérifier qu'aucun soumissionnaire ne réalise de marchés publics en collaborant avec une société de location de services qui, après vérification, s'avérerait ne pas être "en règle" en matière de respect des conditions de travail. Il en résulte que, contrairement à ce qu'a retenu la Cour constitutionnelle, il n'est pas totalement exclu que l'art. 6 nLMP/VD puisse avoir pour effet juridique direct d'empêcher certaines entreprises de location de personnel de louer des travailleurs en vue de l'exécution de marchés publics vaudois. Tel serait le cas si l'autorité adjudicatrice devait estimer qu'elles ne sont pas "en règle" en matière de respect des conditions de travail et, sur la base de ce constat, décider d'interdire au soumissionnaire de collaborer avec elles. Sous cet angle, la disposition cantonale est susceptible de restreindre le libre exercice de l'activité économique des recourantes et, par voie de conséquence, de porter atteinte à l'art. 27 Cst. Reste à déterminer si cette restriction de la liberté économique se justifie d'un point de vue constitutionnel. 
 
7.2. Comme tout droit fondamental, la liberté économique peut être restreinte aux conditions de l'art. 36 Cst. Selon cette disposition, la restriction d'un droit fondamental doit être fondée sur une base légale, qui doit être de rang législatif en cas de restriction grave (al. 1); elle doit en outre être justifiée par un intérêt public (al. 2) et être proportionnée au but visé (al. 3). Lorsque l'atteinte est grave, outre que la base légale doit être une loi au sens formel, celle-ci doit être claire et précise. En d'autres termes, l'exigence d'une base légale ne concerne pas que le rang de la norme, mais s'étend aussi à son contenu, qui doit être suffisamment clair et précis (cf. ATF 147 I 393 consid. 5.1.1). L'exigence de précision de la norme vise à permettre aux individus d'adapter leur comportement et de prévoir les conséquences d'un comportement déterminé avec un degré de certitude approprié aux circonstances (ATF 146 I 11 consid. 3.1.2; 143 II 162 consid. 3.2.1). Cette exigence résulte également du principe de la légalité, lequel constitue un principe général de droit pour toute l'activité de l'Etat (art. 5 al. 1 Cst.), mais qui n'a pas de portée propre par rapport à l'art. 36 al. 1 Cst. lorsque les recourants se plaignent, comme en l'espèce, d'une atteinte à leurs droits fondamentaux (ATF 149 I 329 consid. 6.1 et 6.2).  
 
7.3. En l'occurrence, la Cour constitutionnelle a retenu que l'art. 6 nLMP/VD obligeait clairement les soumissionnaires retenus ou leurs éventuels sous-traitants à annoncer au pouvoir adjudicateur leur intention de s'adjoindre les services de travailleurs intérimaires dans le cadre de l'exécution d'un marché public afin que l'autorité procède à un contrôle et approuve ce projet. Elle a en revanche concédé que la norme ne définissait pas explicitement le contrôle que devrait concrètement effectuer le pouvoir adjudicateur dans de tels cas et, partant, les situations dans lesquelles ce dernier devrait éventuellement refuser d'approuver l'emploi de travailleurs intérimaires. Les juges précédents ont néanmoins estimé que ces différents points étaient clarifiés par l'exposé des motifs accompagnant le projet de nouvelle loi. Celui-ci expliquait qu'en application de l'art. 6 nLMP/VD, les autorités adjudicatrices devaient s'assurer que la société bailleresse de services envisagée par l'entreprise adjudicataire ou ses sous-traitants était "en règle" avec les conditions de travail et qu'elle respectait en particulier les conventions collectives de travail applicables à ses employés (cf. Exposé des motifs concernant le projet de décret portant adhésion du Canton de Vaud à l'Accord intercantonal du 15 novembre 2019 sur les marché publics et sur le projet de loi sur les marchés publics, juin 2021, 21_LEG_82, p. 19, traité lors de la séance du Grand Conseil du mardi 31 mai 2022, consulté sur www.vd.ch/toutes-les-autorites/grand-conseil/seances-du-grand-conseil le 5 mars 2024). La Cour constitutionnelle a relevé qu'il s'agissait là d'une procédure connue des autorités adjudicatrices, puisque celles-ci procédaient déjà à un contrôle comparable des soumissionnaires et de leurs sous-traitants, en interpellant en pratique la commission professionnelle paritaire compétente, sans que cela ne pose de problème.  
 
7.4. La Cour de céans constate pour sa part que l'art. 6 nLMP/VD constitue une base légale formelle qui prévoit clairement une procédure d'annonce et de contrôle avant toute intervention de travailleurs intérimaires dans le cadre de l'exécution d'un marché public, sans toutefois régler expressément les conditions dans lesquelles une autorité adjudicatrice pourrait refuser une telle intervention. Ce n'est qu'en procédant à une interprétation de l'art. 6 nLMP/VD que l'autorité précédente a retenu que le pouvoir adjudicateur devrait en pratique approuver le recours au travail intérimaire chaque fois que l'entreprise de location de services envisagée par l'adjudicataire ou par ses sous-traitants serait "en règle" avec les conditions de travail, légales ou contractuelles, qui lui sont applicables. Or, cette manière d'appliquer - ou d'envisager l'application de - la disposition contestée a pour particularité de n'imposer aucune obligation véritablement nouvelle aux entreprises de location de services, qui sont de toute manière tenues de respecter les conditions de travail légalement ou contractuellement applicables à leurs travailleurs intérimaires. A cela s'ajoute que cette interprétation de la loi ressort déjà du titre même de l'art. 6 nLMP/VD. Celui-ci renvoie expressément à l'art. 12 AIMP 2019 qui, pour rappel, prévoit que les marchés publics ne sont adjugés qu'à des soumissionnaires qui respectent, entre autres exigences, les conditions de travail en vigueur en Suisse (cf. supra consid. 6.2 et 6.6). Il en résulte que l'objet de la procédure d'annonce et de contrôle prévue à l'art. 6 nLMP/VD, tel qu'interprété par l'autorité précédente, n'a rien d'imprévisible ou de surprenant. On ne peut dès lors reprocher à cette disposition un défaut de densité ou de précision normatives contraire au principe de la légalité ancré à l'art. 36 al. 1 Cst. et à l'art. 5 al. 1 Cst.  
 
7.5. Pour le reste, comme on l'a déjà dit, la procédure d'annonce et de contrôle prévue à l'art. 6 nLMP/VD poursuit un intérêt public légitime, à savoir la garantie d'une concurrence efficace et équitable entre les soumissionnaires (cf. supra consid. 6.6). Il n'est par ailleurs pas contesté que cette mesure est non seulement apte à atteindre ce but, mais qu'elle ne restreint finalement que peu la liberté économique des recourantes. Celles-ci, contrairement à ce qu'elles affirment dans leurs écritures, ne se voient nullement empêchées de proposer leurs services à des entreprises adjudicataires de marchés publics vaudois tant qu'elles respectent les conditions de travail légales ou contractuelles applicables à leurs travailleurs intérimaires, c'est-à-dire des règles auxquelles elles doivent en principe de toute manière se conformer. Sous l'angle de la proportionnalité, les recourantes ne remettent finalement en cause que la nécessité de l'art. 6 nLMP/VD, en arguant que le but visé par cette norme pourrait être atteint par des mesures moins incisives qu'une procédure de contrôle et d'approbation. La Cour de céans ne voit cependant pas d'emblée quelle mesure moins sévère le législateur vaudois aurait pu mettre en place pour s'assurer que l'ensemble des participants au marché public vaudois - y compris les entreprises de location de services - respectent les conditions de travail. Dans la mesure où les recourantes n'en citent elles-mêmes aucune, il n'y a pas lieu de traiter plus avant leur grief (cf. art. 106 al. 2 LTF et supra consid. 2.1).  
 
7.6. Sous le couvert d'une violation de leur droit à la liberté économique et du principe de la légalité, les recourantes se plaignent en réalité surtout des différents problèmes que pourrait poser l'art. 6 LMP dans la pratique. Elles relèvent notamment ne pas savoir si une ancienne sanction pour non-respect des conditions de travail ou, à l'inverse, une sanction non encore entrée en force pourraient à elles seules conduire à considérer qu'elles ne sont pas "en règle" en matière de respect des conditions de travail et, partant, à leur refuser systématiquement le droit de proposer leurs travailleurs intérimaires pour la réalisation d'un marché public. De même les recourantes s'interrogent-elles encore sur la manière de contrôler qu'elles sont en règle avec les conditions de travail, sachant que leurs travailleurs peuvent être soumis à des conventions collectives de travail différentes d'un secteur économique à l'autre, ainsi que sur les conséquences juridiques d'un refus d'approbation sur un contrat de location de services déjà conclu, voire sur une décision d'adjudication entrée en force. Si une simple lecture de l'art. 6 nLMP/VD ne permet effectivement pas de trancher sans hésitation chacune de ces questions, dont certaines se posent d'ailleurs également en lien avec la problématique du respect des conditions de travail par les soumissionnaires (cf. p. ex. arrêt 2C_159/2021 du 11 mai 2022 consid. 3.4.5), les recourantes perdent toutefois de vue que le principe de la légalité n'exige pas que la loi au sens formel règle la totalité des problèmes pouvant se poser en relation avec l'objet d'une réglementation. Un tel principe vaut d'autant plus dans le cadre d'un recours dirigé directement contre un acte normatif cantonal, dont les problèmes d'application peuvent non seulement être solutionnés par une réglementation d'exécution, mais aussi donner lieu à des recours concrets ultérieurs, ainsi que cela a déjà été dit, dans le cadre desquels une violation du droit à la liberté économique peut encore être invoquée (cf. supra consid. 2.2).  
 
7.7. Sur le vu de ce qui précède, le recours est mal fondé en tant qu'il prétend que l'art. 6 nLMP/VD ne satisferait pas aux exigences du principe de la légalité et qu'il constituerait une atteinte injustifiée à leur liberté économique garantie par l'art. 27 Cst.  
 
8.  
Partant, le recours doit être rejeté. 
 
9.  
Succombant, les recourantes doivent supporter les frais judiciaires solidairement entre elles (art. 66 al. 1 et 5 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge des recourantes, débitrices solidaires. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire des recourantes, au Grand Conseil du canton de Vaud, au Conseil d'État du canton de Vaud, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour constitutionnelle, et au Département fédéral des finances (DFF). 
 
 
Lausanne, le 24 mai 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
Le Greffier : E. Jeannerat