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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
7B_450/2024  
 
 
Arrêt du 1er juillet 2024  
 
IIe Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Abrecht, Président, 
Kölz et Hofmann. 
Greffier: M. Magnin. 
 
Participants à la procédure 
1. B.A.________, 
2. C.A.________, 
tous les deux représentés par Me Romain Jordan, 
recourants, 
 
contre  
 
1. Sabina Mascotto, Présidente du Tribunal correctionnel, rue des Chaudronniers 9, case postale 3715, 1211 Genève 3, 
2. Alexandra Banna, Juge, p.a. Tribunal correctionnel, rue des Chaudronniers 9, case postale 3715, 1211 Genève 3, 
3. Cédric Genton, Juge, p.a. Tribunal correctionnel, rue des Chaudronniers 9, case postale 3715, 1211 Genève 3, 
intimés. 
 
Objet 
Récusation, 
 
recours contre l'arrêt rendu le 27 février 2024 par la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ACPR/144/2024 - PS/11+12/2024). 
 
 
Faits:  
 
A.  
 
A.a. Des membres de la famille A.________, composée de C.A.________ (père), D.A.________ (mère), E.A.________ (fils) et B.A.________ (épouse de ce dernier) sont prévenus dans une procédure pénale ouverte par le Ministère public de la République et canton de Genève (ci-après: le Ministère public) pour, notamment, traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 2 CP), usure par métier (art. 157 ch. 1 et 2 CP) et infractions à la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI; RS 142.20).  
 
A.b. Par acte d'accusation du 14 février 2023, complété et corrigé le 15 août 2023, le Ministère public a renvoyé les prévenus devant le Tribunal correctionnel de la République et canton de Genève (ci-après: le tribunal). Les débats devant ce tribunal, composé de la présidente Sabina Mascotto et des juges Alexandra Banna et Cédric Genton, étaient initialement prévus du 2 au 6 octobre 2023, puis du 20 au 23 novembre 2023. Ils ont ensuite été reportés au 15 janvier 2024.  
 
A.c. Les 11 et 12 janvier 2024, C.A.________ a, par l'intermédiaire de son défenseur, demandé le report des débats pour des raisons de santé. Le 13 janvier 2024, le défenseur du prénommé a indiqué au tribunal que son propre état de santé l'empêcherait d'assister son client, et ce, jusqu'au 16 janvier 2024. Le 14 janvier 2024, l'ajournement des débats a été requis en raison de l'absence de ce défenseur (art. 105 al. 2 LTF). Le 15 janvier 2024, le matin, le défenseur de B.A.________ a écrit au tribunal pour l'informer qu'il n'était pas non plus en état de comparaître pour des raisons de santé.  
 
A.d. Le 15 janvier 2024, le tribunal a tenu l'audience et a procédé à l'ouverture des débats. Selon le procès-verbal, C.A.________ n'a pas comparu et son défenseur, ainsi que celui de B.A.________, étaient absents. Le procès-verbal relève qu'après avoir entendu les parties présentes et reçu, en cours d'audience, un certificat médical du défenseur de la prénommée, le tribunal a constaté l'absence de C.A.________ et de D.A.________, a ajourné les débats au surlendemain pour traiter des questions préjudicielles et a décidé que de nouveaux débats se tiendraient à partir du 25 janvier 2024.  
 
A.e. Le 19 janvier 2024, le défenseur de C.A.________ a demandé à la présidente du tribunal de constater la nullité du procès-verbal du 15 janvier 2024, de révoquer les mandats de comparution décernés à cette occasion, d'annuler l'audience du 25 janvier 2024 et de convoquer des débats à une date ultérieure. Il a en outre demandé que son client soit dispensé de comparaître pour le cas où le tribunal examinerait ces questions le 25 janvier 2024.  
 
B.  
 
B.a. Les 22 et 23 janvier 2024, B.A.________ et C.A.________ ont déposé une demande de récusation contre les membres du tribunal. B.A.________ s'est plainte du fait que l'audience du 15 janvier 2024 avait été ouverte malgré l'absence de son défenseur et que les parties avaient plaidé sur le report des débats, ainsi que sur l'absence des deux avocats des prévenus. Elle a ajouté que le tribunal lui avait communiqué, le 22 janvier 2024, le fait que la validité de l'audience précitée était confirmée, que "tout était maintenu" et que "l'argumentation" était écartée, de sorte que les juges avaient démontré, selon elle, une volonté "jusqu'au-boutiste", qui se cumulait avec un grave passif entachant la procédure depuis l'envoi des premières convocations aux débats. Elle a en outre relevé que plusieurs "représentants" dans la salle, mais aussi la presse, avaient tourné en ridicule son défenseur. Elle a relevé un manque d'indépendance et de recul. C.A.________ a pour sa part fait valoir que la tenue de l'audience du 15 janvier 2024 relevait d'une grossière erreur et que le tribunal avait persisté, malgré sa requête du 19 janvier 2024, à convoquer les parties à une nouvelle audience, malgré le fait que les débats n'avaient pas été valablement ouverts. Il a considéré que cet acharnement dépassait l'entendement et que, cumulé à d'autres procédés viciés, il imposait la récusation du tribunal.  
 
B.b. Dans ses prises de position du 30 janvier 2024, le tribunal a décrit, références à l'appui, le déroulement de l'audience du 15 janvier 2024 et les évènements qui se sont produits ensuite (art. 105 al. 2 LTF). Il a en particulier indiqué que, lors de l'audience du 15 janvier 2024, les débats avaient uniquement été ouverts et que la direction de la procédure avait suivi l'art. 339 al. 1 CPP. Il a ajouté qu'aucuns débats ne s'étaient tenus, qu'aucune question préjudicielle n'avait été traitée, qu'aucune audition n'avait eu lieu et que l'absence des défenseurs des prévenus avait conduit à l'ajournement des débats.  
 
B.c. Dans sa réplique, B.A.________ a décrit, sur treize pages, l'évolution de la procédure depuis l'émission des premiers mandats de comparution et des comptes rendus parus dans la presse à la suite de l'audience du 15 janvier 2024. Elle a exposé qu'elle s'était, selon elle, retrouvée sans défenseur pendant 2 heures et 45 minutes, exposée à la chronique judiciaire et sans que le tribunal ait jamais recadré les interventions des parties adverses. C.A.________ a pour sa part indiqué que le cumul de "postures" du tribunal suscitait chez lui la crainte que la "messe soit dite".  
 
B.d. Lors de l'audience du 25 janvier 2024, C.A.________, absent, et B.A.________ ont, par l'intermédiaire de leur défenseur, obtenu la possibilité de plaider leurs demandes de récusation. Le tribunal a décidé de rejeter ces requêtes et d'ouvrir une procédure par défaut concernant C.A.________ et D.A.________. Il a suspendu l'audience et leur a réservé la possibilité de comparaître et d'être entendus.  
 
B.e. Par arrêt du 27 février 2024, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Chambre pénale de recours) a rejeté les requêtes de récusation formulées par C.A.________ et B.A.________.  
 
C.  
Par acte du 15 avril 2024, C.A.________ et B.A.________ (ci-après: les recourants) forment un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre cet arrêt, en concluant à son annulation et au renvoi de la cause à la Chambre pénale de recours pour instruction complémentaire et qu'elle prononce la récusation de la présidente Sabina Mascotto et des juges Alexandra Banna et Cédric Genton (ci-après: les intimés). 
Le 22 avril 2024, les intimés, qui ont renoncé à déposer une réponse, ont conclu au rejet du recours. Les 6 et 27 mai 2024, la Chambre pénale de recours a renoncé à présenter des observations. Le 17 mai 2024, les recourants ont persisté "intégralement dans leur recours et ses conclusions". 
Le 5 juin 2024, les recourants ont déposé une requête de mesures provisionnelles visant à la suspension et au report des débats devant le tribunal prévus dès le 10 juin 2024. Par ordonnance du lendemain, le Juge instructeur de la IIe Cour de droit pénal a rejeté cette requête. 
 
 
Considérant en droit:  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 149 IV 9 consid. 2). 
Une décision - rendue par une autorité cantonale statuant en tant qu'instance unique (art. 80 al. 2 in fine LTF) - relative à la récusation de magistrats pénaux peut faire immédiatement l'objet d'un recours en matière pénale, malgré son caractère incident (cf. art. 78 et 92 al. 1 LTF). Les recourants, prévenus, dont les demandes de récusation ont été rejetées, ont qualité pour recourir en vertu de l'art. 81 al. 1 LTF.  
Pour le surplus, les autres conditions de recevabilité étant réalisées, il y a lieu d'entrer en matière. 
 
2.  
 
2.1. Les recourants invoquent une violation de l'art. 56 let. f CPP. Ils font valoir que les membres du tribunal auraient, à plusieurs reprises durant la procédure, ainsi que lors de l'audience du 15 janvier 2024, violé leurs devoirs de magistrats. Ils relèvent notamment l'attitude des intimés pendant et après l'audience du 15 janvier 2024, en particulier le refus d'ajourner celle-ci ou le fait qu'ils ne soient pas intervenus contre les "attaques" formulées par les autres parties à leur endroit. Ils considèrent en particulier qu'il existerait un indice de prévention de la part du tribunal, parce que celui-ci n'aurait pas, au cours de la procédure, respecté leur droit à un procès équitable, en particulier leur droit effectif à être défendu par un avocat, et qu'une telle violation se serait répétée à l'occasion de l'audience du 15 janvier 2024, ce qui constituerait la "goutte d'eau qui fait déborder le vase". Ils se plaignent en outre d'une violation de leur droit d'être entendus et d'un déni de justice formel, dans la mesure où la cour cantonale n'aurait pas tenu compte de l'ensemble des allégations qu'ils avaient formulées dans le cadre de leurs requêtes de récusation.  
 
2.2.  
 
2.2.1. Le droit d'être entendu, garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., implique pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et afin que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. Le juge doit ainsi mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision (ATF 146 II 335 consid 5.1; 143 III 65 consid. 5.2; 139 IV 179 consid. 2.2), de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 143 IV 40 consid. 3.4.3; 141 IV 249 consid. 1.3.1; 139 IV 179 consid. 2.2). Il n'a toutefois pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à l'examen de ceux qui lui paraissent pertinents et aux questions décisives pour l'issue du litige (ATF 147 IV 249 consid. 2.4; 142 II 154 consid. 4.2; 139 IV 179 consid. 2.2). La motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1; arrêt 6B_1246/2022 du 11 octobre 2023 consid. 3.1 et les arrêts cités). L'autorité qui ne traite pas un grief relevant de sa compétence, motivé de façon suffisante et pertinent pour l'issue du litige, commet un déni de justice formel proscrit par l'art. 29 al. 1 Cst. (ATF 142 II 154 consid. 4.2; arrêt 6B_1446/2021 du 9 décembre 2022 consid. 3.1.2 et l'arrêt cité). Le droit d'être entendu n'est pas une fin en soi. Il constitue un moyen d'éviter qu'une procédure judiciaire débouche sur un jugement vicié en raison de la violation du droit des parties de participer à la procédure, notamment à l'administration des preuves. Lorsqu'on ne voit pas quelle influence la violation du droit d'être entendu a pu avoir sur la procédure, il n'y a pas lieu d'annuler la décision attaquée (ATF 143 IV 380 consid. 1.4.1; arrêt 6B_659/2022 du 17 mai 2023 consid. 3.2 et les arrêts cités).  
 
2.2.2. Selon l'art. 56 let. f CPP, toute personne exerçant une fonction au sein d'une autorité pénale est tenue de se récuser lorsque d'autres motifs, notamment un rapport d'amitié étroit ou d'inimitié avec une partie ou son conseil juridique, sont de nature à la rendre suspecte de prévention.  
L'art. 56 let. f CPP a la portée d'une clause générale recouvrant tous les motifs de récusation non expressément prévus aux lettres précédentes de l'art. 56 CPP. Cette clause correspond à la garantie d'un tribunal indépendant et impartial instituée par les art. 30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH (ATF 143 IV 69 consid 3.2). Elle concrétise aussi les droits déduits de l'art. 29 al. 1 Cst. garantissant l'équité du procès et assure au justiciable cette protection lorsque d'autres autorités ou organes que des tribunaux sont concernés (ATF 141 IV 178 consid. 3.2.2). Cette clause générale n'impose pas la récusation seulement lorsqu'une prévention effective du magistrat est établie, car une disposition interne de sa part ne peut guère être prouvée. Il suffit ainsi que ces circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale du magistrat (ATF 149 I 14 consid. 5.3.2; 147 III 89 consid. 4.1; 144 I 159 consid. 4.3). Tel peut notamment être le cas de propos ou d'observations, formulés par le juge avant ou pendant le procès, dont la teneur laisse entendre que celui-ci s'est déjà forgé une opinion définitive sur l'issue de la procédure (ATF 137 I 227 consid. 2.1; 134 I 238 consid. 2.1; arrêt 7B_57/2022 du 27 mars 2024 consid. 8.2.1). Dans ce contexte toutefois, seules des circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération, les impressions purement subjectives des parties n'étant pas décisives (ATF 144 I 159 consid. 4.3; 142 III 732 consid. 4.2.2). 
 
2.2.3. Selon la jurisprudence, des décisions ou des actes de procédure qui se révèlent par la suite erronés ne fondent pas en soi une apparence objective de prévention; seules des erreurs particulièrement lourdes ou répétées, constitutives de violations graves des devoirs de la personne en cause, peuvent fonder une suspicion de partialité, pour autant que les circonstances dénotent que cette dernière est prévenue ou justifient à tout le moins objectivement l'apparence de prévention. Il appartient en outre aux juridictions de recours normalement compétentes de constater et de redresser les erreurs éventuellement commises dans ce cadre. La procédure de récusation n'a donc pas pour objet de permettre aux parties de contester la manière dont est menée l'instruction et de remettre en cause les différentes décisions incidentes prises par la direction de la procédure (ATF 143 IV 69 consid. 3.2; arrêts 7B_677/2023 du 24 novembre 2023 consid. 3.2; 7B_189/2023 du 16 octobre 2023 consid. 2.2.1). Enfin, conformément à l'art. 58 al. 1 CPP, la récusation doit être demandée sans délai, dès que la partie a connaissance du motif de récusation, c'est-à-dire dans les jours qui suivent la connaissance de la cause de récusation, sous peine de déchéance (ATF 140 I 271 consid. 8.4.3; arrêt 7B_57/2022 du 27 mars 2024 consid. 8.2.2).  
 
2.2.4. Lorsque seule l'accumulation de plusieurs incidents fonde l'apparence d'une prévention, il doit être tenu compte, dans l'examen de l'éventuel caractère tardif d'une requête de récusation, du fait que le requérant ne puisse réagir à la hâte et doive, le cas échéant, attendre afin d'éviter le risque que sa requête soit rejetée. Il doit ainsi être possible, en lien avec des circonstances nouvellement découvertes, de faire valoir des faits déjà connus si seule une appréciation globale permet d'admettre un motif de récusation, bien qu'en considération de chaque incident pris individuellement, la requête n'aurait pas été justifiée. Si plusieurs occurrences fondent seulement ensemble un motif de récusation, celle-ci peut être demandée lorsque, de l'avis de l'intéressé, la dernière de ces occurrences est la "goutte d'eau qui fait déborder le vase". Dans un tel cas, l'examen des événements passés, dans le cadre d'une appréciation globale, n'est admise que pour autant que la dernière occurrence constitue en elle-même un motif de récusation ou à tout le moins un indice en faveur d'une apparence de prévention. Cependant, même s'il est admis que la partie qui demande la récusation d'un magistrat puisse se prévaloir, au moment d'invoquer une suspicion de prévention, d'une appréciation globale des erreurs qui auraient été commises en cours de procédure, il ne saurait pour autant être toléré qu'une répétition durable de l'accusation de partialité apparaisse comme un moyen de pression sur le magistrat pour l'amener progressivement à se conformer aux seules vues de la partie (arrêt 1B_163/2022 du 27 février 2023 consid. 3.1 et les arrêts cités).  
 
2.3. L'autorité cantonale a relevé que, depuis le mois d'août 2023, les recourants avaient déposé, outre les présentes, sept demandes de récusation visant la direction de la procédure du tribunal ou les juges composant celui-ci. Elle a constaté que toutes ces demandes avaient été rejetées, y compris celles déférées devant le Tribunal fédéral. Dans ces circonstances, la cour cantonale a considéré qu'il n'y avait pas lieu d'admettre que les requêtes de récusation faisant l'objet de la présente procédure s'inscrivaient dans une configuration dite de la "goutte d'eau qui fait déborder le vase" et qu'il fallait s'en tenir aux seuls griefs se rapportant au déroulement de l'audience du 15 janvier 2024. À cet égard, elle a indiqué que les erreurs de procédure prétendument commises lors de cette audience pourraient être corrigées, le cas échéant, par les voies de droit ordinaires et que si les griefs formulés par les recourants n'avaient à ce stade pas été jugés recevables sous l'angle du recours au sens de l'art. 393 al. 1 let. b CPP, cela ne signifiait pas que toute voie de droit leur serait fermée pour obtenir la réparation des vices dont ils se plaignaient et que la récusation était le seul correctif. Par ailleurs, la juridiction cantonale a relevé que la police de l'audience n'avait pas été défaillante ni partiale le 15 janvier 2024 et que si les interventions des représentants du Ministère public ou des parties plaignantes avaient fortement déplu aux recourants, elles ne pouvaient être imputées aux magistrats intimés. Elle a ajouté que ceux-ci ne pouvaient en outre pas être tenus pour responsables du sentiment des recourants d'avoir été tournés en ridicule en raison des justificatifs des absences médicales de leur défenseur. En définitive, elle a considéré que rien, dans le déroulement de l'audience du 15 janvier 2024, ne démontrait de parti pris du tribunal envers les recourants et que leurs demandes successives de récusation prenaient toutes les apparences de pressions répétées sur le tribunal pour l'amener à se conformer strictement à leurs vues (arrêt querellé, pp. 6-7).  
 
2.4.  
 
2.4.1. Les recourants reprochent à la cour cantonale une mauvaise application de la jurisprudence dite de "la goutte d'eau qui fait déborder le vase". Ils estiment que, dans ce cadre, celle-là devait procéder, pour déterminer s'il existait une apparence de prévention ou de partialité du tribunal, à une appréciation globale de la situation en prenant en compte chaque incident, à savoir notamment l'émission des doubles convocations à l'endroit des prévenus, l'interdiction de postuler de l'avocat du recourant au mois de septembre 2023 et les "mensonges" du tribunal relatifs à ses contacts avec la presse. Ils précisent qu'à ces incidents s'ajouteraient ceux qui se seraient déroulés lors de l'audience du 15 janvier 2024.  
Cela étant, selon la jurisprudence décrite ci-dessus (cf. consid. 2.2.4 supra), il y a lieu de tenir compte, dans le cadre d'une appréciation globale, des incidents passés si la dernière occurrence, à savoir en l'espèce le déroulement de l'audience du 15 janvier 2024, constitue en elle-même un motif de récusation ou un indice en faveur d'une apparence de prévention. À cet égard, l'autorité cantonale a considéré que tel n'était pas le cas. Ainsi, il convient d'examiner si les évènements dont se plaignent les recourants en lien avec cette audience pourraient fonder un motif de récusation du tribunal ou, à défaut, à tout le moins un indice en faveur d'une apparence de partialité.  
 
2.4.2. En ce qui concerne l'audience du 15 janvier 2024, les recourants font grief au tribunal d'avoir refusé, selon eux en violation notamment de l'art. 336 al. 5 CPP, de reporter et d'ajourner les débats, ainsi que d'avoir permis au Ministère public et aux avocats des parties plaignantes de plaider et de s'en prendre à eux. Ils lui reprochent en particulier d'avoir laissé leurs parties adverses les "vilipender" en n'intervenant pas pour recadrer les plaideurs, ce qui aurait eu pour conséquence, selon eux, de les faire passer, notamment au travers des médias, pour des personnes qui méprisent la loi, la justice suisse et les victimes. Ils reprochent en outre au tribunal de ne pas avoir respecté, lors de cette audience, leur droit à être défendus par un avocat.  
 
2.4.3. En l'espèce, le tribunal a, lors de l'audience du 15 janvier 2015, procédé à l'ouverture des débats. Il a constaté la présence et l'absence des personnes citées à comparaître, en particulier l'absence du recourant et de D.A.________, ainsi que celle des défenseurs des recourants. Il a ensuite informé les parties que les défenseurs du recourant et de D.A.________ avaient sollicité le report des débats, puis a demandé aux parties présentes si elles souhaitaient s'exprimer sur cette demande de report, ainsi que sur celle d'ajournement en raison de l'absence des avocats en question. Les parties présentes ont plaidé ces questions et le tribunal a constaté l'absence de C.A.________ et de D.A.________, indiquant au surplus qu'il leur notifierait, par leur défenseur, un mandat pour comparaître à de nouveaux débats fixés le 25 janvier 2024. Le tribunal a également ajourné les débats au 17 janvier 2024 en raison de l'absence des avocats concernés afin d'examiner des questions préjudicielles, avant de suspendre l'audience.  
Il résulte de ce qui précède que le tribunal s'est limité à ouvrir les débats conformément à l'art. 339 al. 1 CPP, à constater l'absence des personnes qui ne s'étaient pas présentées aux débats et à statuer sur les demandes de report, respectivement d'ajournement des débats qui avaient été présentées par les intéressés absents avant l'audience du 15 janvier 2024. Celle-ci n'a dès lors porté que sur ces demandes, de sorte qu'on ne saurait considérer que les débats se seraient tenus ou auraient été menés à cette occasion en l'absence des défenseurs concernés et donc en violation des droits de procédure de leurs clients, en particulier leur droit effectif à être défendus par un avocat. Le tribunal n'a en effet procédé à aucune administration des preuves, ni à aucun acte d'instruction. Il n'a par ailleurs statué sur aucune autre question préjudicielle, puisqu'il a renvoyé l'audience, pour la première fois au 17 janvier 2024, pour le faire. Le tribunal a en outre agi conformément aux dispositions du CPP, dans la mesure où il a, d'une part, fixé de nouveaux débats au 25 janvier 2024 en notifiant un mandat de comparution aux prévenus absents comme le prévoit l'art. 366 al. 1 CPP et, d'autre part, ajourné les débats conformément à l'art. 336 al. 5 CPP pour tenir compte de l'absence des avocats des prévenus au bénéfice d'une défense obligatoire. Sur ce dernier point, on peut préciser que la position des défenseurs absents, et donc également celle de la recourante, était connue de ceux-ci avant l'audience et qu'il était normal que le tribunal donne la possibilité aux parties de s'exprimer sur leurs demandes. On ne saurait enfin reprocher au tribunal d'avoir porté à la connaissance des parties les raisons qui ont conduit à l'absence des prévenus et des avocats absents à l'audience, dès lors que les autres parties ont ensuite dû se déterminer sur les demandes de report et d'ajournement précitées. 
Par ailleurs, c'est en vain que les recourants se plaignent de l'attitude du tribunal, parce qu'il n'aurait pas recadré les représentants du Ministère public et des parties plaignantes pendant leurs plaidoiries. Il ne ressort en effet pas des faits retenus que le contenu des plaidoiries en question aurait outrepassé les règles de bienséance et aurait ainsi nécessité une intervention du tribunal. À cet égard, le raisonnement de l'autorité cantonale ne prête pas le flanc à la critique, dès lors que les intimés ne sauraient être tenus pour responsables des remarques formulées par les parties adverses des recourants et des médias au sujet de leur comportement, le cas échéant de celui de leur défenseur. 
 
2.4.4. Il s'ensuit que la dernière occurrence permettant de considérer qu'il s'agirait de la "goutte d'eau qui fait déborder le vase" - pour reprendre les termes de la jurisprudence -, à savoir le déroulement de l'audience du 15 janvier 2024, ne permet pas de fonder un motif de récusation du tribunal, ni un indice en faveur d'une apparence de prévention de celui-ci. Ainsi, la cour cantonale n'avait pas à procéder à une appréciation globale de chacun des incidents invoqués par les recourants dans leur requête de récusation ou leur réplique. En tant qu'elles concernent les incidents cités par les recourants (notamment émission de doubles convocations au mois d'août 2023; refus prétendument injustifié d'accéder au contenu des téléphones des parties plaignantes au mois de septembre 2023; interdiction de postuler de l'avocat du recourant et nomination d'office d'un autre avocat à la fin du mois de septembre 2023; publication édictale dans la feuille des avis officielle genevoise au début du mois d'octobre 2023; "mensonges" du tribunal en lien avec ses contacts avec la presse au début de mois de novembre 2023), les demandes de récusation se révèlent dès lors tardives au sens de l'art. 58 al. 1 CPP et, par conséquent, irrecevables, dans la mesure où il n'a pas déjà été statué sur ces questions (cf. arrêts 7B_677/2023 du 24 novembre 2023; 7B_1/2024 du 28 février 2024).  
 
2.4.5. On peut ajouter que l'argumentation de l'autorité cantonale selon laquelle les recourants conservent la possibilité de soulever au moyen des voies de droit ordinaires d'éventuels vices de procédure de la part des intimés dont ils se plaignent - le cas échéant se plaindraient encore - ne prête pas le flanc à la critique, dès lors que les intéressés pourront effectivement le faire dans le cadre de la procédure au fond, à savoir dans le cadre de la procédure d'appel, puis le cas échéant devant le Tribunal fédéral. On rappelle en effet à cet égard que la procédure de récusation n'a pas pour objet de permettre aux parties de contester la manière dont est menée l'instruction et de remettre en cause les différentes décisions incidentes prises par la direction de la procédure et qu'il appartient aux juridictions de recours normalement compétentes de constater et de redresser les erreurs éventuellement commises dans ce cadre. Les recourants ne sauraient dès lors contester la validité de l'ordre de dépôt délivré le 18 janvier 2024 par la direction de la procédure (vexatoire, selon les impressions purement subjectives des recourants) au moyen de la présente demande de récusation, ni les ajournements successifs de l'audience entre le 15 et le 25 janvier 2024. C'est au surplus en vain que les recourants reprochent au tribunal une violation grave de l'art. 336 al. 5 CPP pour avoir refusé d'ajourner les débats avant et après l'audience du 15 janvier 2024, puisque celui-ci a finalement ajourné les débats après cette date, au 25 janvier 2024, que les avocats précédemment absents y étaient présents et qu'il n'en est dès lors résulté aucune violation éventuelle de cette disposition légale. À ce propos, on précise qu'on ne saurait reprocher au tribunal, au vu des multiples précédents reports d'audience, d'avoir voulu faire avancer son procès rapidement. On peut encore relever qu'il aurait en l'occurrence été conforme au principe de la bonne foi en procédure que le défenseur de la recourante se fasse remplacer par un des nombreux collaborateurs de son étude - qui n'avait alors pas besoin de connaître l'aspect matériel du dossier - pour l'ouverture des débats afin de confirmer sa demande d'ajournement. Celui-ci n'a toutefois pas jugé utile de le faire, de sorte qu'il ne saurait aujourd'hui se plaindre du fait que sa cliente se soit retrouvée seule lors de l'audience du 15 janvier 2024.  
 
2.4.6. Enfin, l'autorité cantonale n'avait pas l'obligation de discuter tous les faits, moyens de preuve ou griefs et pouvait, comme elle l'a fait (cf. consid. 2.4.4 supra), se limiter aux questions qu'elle estimait décisives pour l'issue du litige. Ainsi, elle n'a pas violé de droit d'être entendu des recourants, ni commis de déni de justice formel, en ne retranscrivant pas l'entier des allégations de fait contenues dans les demandes de récusation et répliques des intéressés.  
 
2.4.7. En définitive, l'autorité cantonale n'a pas violé le droit fédéral en considérant qu'il n'existait en l'espèce aucun motif de récusation au sens de l'art. 56 let. f CPP et en rejetant les requêtes de récusation des recourants.  
 
3.  
Le recours doit donc être rejeté. 
Les recourants, qui succombent, supporteront solidairement les frais judiciaires (art. 66 al. 1 et 5 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis solidairement à la charge des recourants. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève et au Ministère public de la République et canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 1er juillet 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président: Abrecht 
 
Le Greffier: Magnin